Introduction: Vers une révolution entrepreneuriale?
En mai 2025, la scène technologique s’est retrouvée fascinée par une affirmation choc, rapportée par Maddyness : selon Sam Altman, l’ère d’une startup valorisée à un milliard de dollars, mais sans aucun salarié humain, n’est plus une utopie. Ce scénario, où seule une intelligence artificielle générale (ou AGI) piloterait toutes les opérations, place la ia générale au cœur d’un débat brûlant. Cette prophétie intervient alors que la frontière entre intelligence artificielle spécialisée et IA généraliste autonome s’amenuise, portées par des modèles toujours plus puissants.
Ce contexte s’accompagne d’une croissance explosive des capacités des IA génératives et autonomes, capables d’assurer la gestion, la R&D, la finance ou la relation client sans intervention humaine. Mais au-delà de la prouesse technique, cette perspective de licornes » sans salariés » bouscule radicalement la vision de l’entrepreneuriat, de la valeur et du travail.
Si l’hypothèse d’Altman divise autant qu’elle fascine, elle témoigne d’un point de bascule dans l’histoire des startups. L’intelligence artificielle générale risque-t-elle de bouleverser le tissu entrepreneurial à l’image de ce que la révolution industrielle a fait pour l’artisanat? Ou n’est-elle qu’un mirage temporaire? Les débats sont ouverts, comme le montrent d’autres articles phares sur l’impact sur les inégalités ou les risques systémiques de l’IAG.
De l’automatisation à l’AGI-Entreprise: étapes, exemples et prospectives
L’automatisation au sein des organisations ne date pas d’hier, mais la trajectoire a connu une accélération fulgurante ces dernières années. Initialement limitée à la robotique industrielle et à l’automatisation des tâches répétitives (comptabilité, gestion des emails, chaîne logistique), l’intelligence artificielle se déploie désormais sur toute la chaîne de valeur, jusqu’à l’apparition de ce que l’on nomme des « startups sans salariés ».
Des exemples récents, même s’ils ne sont pas encore pleinement fonctionnels sous la forme d’une AGI, illustrent cette tendance. Selon Maddyness, plusieurs startups explorent l’automatisation intégrale via des agents IA chargés du support client, de l’optimisation de la production ou de la prise de décision. Ainsi, des plateformes comme Devin AI, qui automatise le développement logiciel, ou les start-ups listées sur Licorne Society (ex: Diabeloop en santé), montrent jusqu’où peut aller la délégation à l’intelligence artificielle.
Dans un futur proche, on peut imaginer un scénario prospectif où une AGI contrôle:
- La recherche et développement, en analysant continuellement publications et brevets
- La chaîne financière, de la gestion des investissements jusqu’aux prévisions financières
- La relation client, via des agents conversationnels ultra-réalistes
- L’ensemble de la stratégie de croissance, basée sur le traitement en temps réel de millions de données
Ces sociétés, « AGI-entreprises », remettraient en cause les distinctions traditionnelles entre directions fonctionnelles, tout en rendant flous les contours de la propriété intellectuelle et de la responsabilité humaine. Rappelons que cette révolution soulève aussi d’énormes défis énergétiques et de cybersécurité, comme souligné dans cet article sur les défis écologiques de l’AGI.
Impacts économiques et sociaux d’une startup sans humain
L’avènement des startups pilotées uniquement par une ia générale bouleverserait profondément le modèle économique traditionnel. L’impact principal concerne bien sûr l’emploi : selon une étude IT Social 2025, près de 77 % des employeurs estiment que le recours accru à l’intelligence artificielle générera une vague de transition professionnelle, rendant certains métiers obsolètes mais créant aussi d’autres formes d’activité.
Dès lors, la place de l’humain dans l’économie serait radicalement redéfinie : les fondateurs humains deviendraient-ils de simples investisseurs, détenant la propriété du code source d’une AGI? La question de la propriété intellectuelle est tout aussi épineuse: une création par une AGI peut-elle être brevetée au nom d’un humain ou d’une entité?
La relation-client, traditionnellement fondée sur la confiance humaine, deviendrait quasi-anonyme, portée par des agents IA: comment préserver l’expérience utilisateur et la transparence?
De plus, des risques majeurs de concentration de valeur apparaissent: des startups sans effectif humain pourraient théoriquement se multiplier sans contrainte de masse salariale, accélérant la logique des super-plateformes et creusant la fracture sociale entre détenteurs des AGI et le reste de la population. Ce problème a d’ailleurs été éclairé dans l’analyse sur l’AGI et la fracture numérique mondiale.
Ainsi, si ces modèles venaient à devenir majoritaires, il serait essentiel de repenser la fiscalité, les protections sociales et la redistribution de la richesse, sous peine de voir s’accroître les tensions et inégalités déjà exacerbées par l’essor de l’IAG.
Défis systémiques et régulations à inventer
L’essor potentiel d’entreprises 100% pilotées par des intelligences artificielles générales pose des défis juridiques et éthiques inédits. Jusqu’à présent, la réglementation rattrape très lentement l’innovation: l’IA Act européen, entrée en vigueur en 2025, pose des limites à l’autonomie totale : « aucun système d’IA ne peut opérer de manière entièrement autonome pour des décisions majeures » (Les Échos).
Pourtant, il n’existe pas encore de cadre dédié aux « entreprises sans tête », où ni employé ni dirigeant humain n’endosse la responsabilité pénale ou morale. Cela soulève la question de la responsabilité légale en cas d’erreur, de délit ou d’accident.
Fiscalité: Qui paye l’impôt si l’entreprise n’a ni employés ni gestionnaires humains? À qui revient la création de valeur? Des pistes comme une « taxe robot » ou une révision des droits sur la propriété intellectuelle des créations non-humaines sont régulièrement évoquées (Vie Publique).
L’éthique, elle, oblige à repenser la surveillance, la transparence et la finalité de ces entités, surtout face au risque de manipulation à grande échelle ou de dérives non prévues par les sociétés actuelles – enjeux aussi abordés dans l’article consacré aux menaces AGI.
On assiste donc à l’émergence d’un vide juridique, que devront combler législateurs et institutions internationales dans les années à venir: le débat est lancé.
Conclusion: science-fiction ou disruption imminente?
La perspective d’une licorne pilotée à 100% par une ia générale cristallise toutes les tensions de la révolution numérique. Entre fantasme de science-fiction et faisabilité technique, le scénario proposé par Sam Altman incarne à la fois les promesses d’efficacité extrême et les risques de déshumanisation du tissu économique.
Une chose est certaine: ce débat sur l’AGI-entreprise dépasse la simple utopie, car il éclaire déjà de nombreux choix stratégiques, juridiques et sociaux auxquels font face gouvernements, innovateurs et citoyens. Pour certains, il s’agit d’une avancée inévitable; pour d’autres, d’un danger pouvant accélérer les inégalités et remettre en cause nos principes de responsabilité ou de solidarité.
Pour aller plus loin, il est crucial d’alimenter un débat rigoureux et informé en croisant analyses techniques, considérations économiques, éthiques et politiques. La crise de sens engendrée par l’intelligence artificielle générale oblige à repenser ce que l’on souhaite pour l’avenir du travail, de l’entrepreneuriat et, plus largement, de notre société: une réflexion poursuivie dans cet article sur l’impact de l’AGI sur l’emploi et d’autres ressources de référence.