L’actualité : 45 grands acteurs européens unis contre l’AI Act en juillet 2025
En juillet 2025, l’Europe a été le théâtre d’un événement inouï: plus de 45 géants industriels, acteurs technologiques et laboratoires de recherche – dont Airbus, ASML, Siemens, SAP, Mistral AI, Aleph Alpha, BNP Paribas, Carrefour, Mercedes-Benz, TotalEnergies, Philips, Black Forest Labs et Lufthansa – ont signé une lettre ouverte adressée à la Commission européenne pour réclamer un gel de l’AI Act.[Politico], [Reuters], [Sifted]
Ces entreprises avancent plusieurs arguments majeurs: le texte, jugé trop rigide, ferait courir un risque de perte de compétitivité face aux États-Unis et à la Chine, menaçant l’avenir des acteurs européens de l’intelligence artificielle générale (ia générale, AGI). Les signataires réclament du temps pour adapter la loi aux spécificités de l’IA généraliste et à la course mondiale vers l’AGI: des exigences trop précoces pourraient freiner la recherche fondamentale comme l’investissement industriel.
Dans leurs déclarations publiques, ces leaders européens insistent sur la nécessité d’un cadre supportant sécurité, innovations et souveraineté technologique. En réaction, Bruxelles maintien la mise en œuvre progressive de l’AI Act, mais dit écouter « attentivement » ce front commun inédit.[Bloomberg]
Cette mobilisation traduit la prise de conscience autour d’une véritable « course à l’intelligence artificielle » européenne, abordée en profondeur dans cet article sur la Shadow AI.
Pourquoi l’Europe craint-elle l’AGI (et pas les autres blocs)?
L’approche européenne vis-à-vis de l’IA générale tranche nettement avec celles des États-Unis ou de la Chine. L’Union européenne place la souveraineté technologique, l’éthique et la sécurité AVANT la compétition pure. Cette posture s’explique par plusieurs peurs structurelles:
- Dépendance aux géants étrangers: Les GAFAM, OpenAI ou leurs homologues chinois dominent le secteur. L’Europe craint la perte d’autonomie sur des modèles d’AGI cruciaux pour les secteurs industriels clés, la recherche ou la sécurité nationale.[Modern Diplomacy]
- Fuite des cerveaux: Les chercheurs et ingénieurs en intelligence artificielle générale sont courtisés par les géants américains ou asiatiques. L’Europe redoute de voir ses talents partir en quête de projets plus flexibles.
- Traumatisme du retard technologique: L’écart creusé, notamment sur l’IAG, nourrit un complexe qui impacte les décisions politiques: mieux vaut sur-réguler que perdre le contrôle sur une superintelligence émergente.
- Sensibilité aux risques: L’UE s’est historiquement positionnée comme leader sur l’éthique numérique (RGPD, DSA…). Son réflexe: baliser la montée en puissance des modèles d’superintelligence artificielle par des normes exigeantes, parfois préventives.
En comparaison, la Chine mise sur le contrôle d’État et la puissance industrielle, tandis que les États-Unis privilégient l’innovation rapide, quitte à jouer avec la prise de risques. Mais la spécificité européenne ouvre aussi la voie à des garde-fous globaux pour l’AGI, analysés dans cet article sur les lignes rouges de la régulation AI.
AI Act: bouclier pour les citoyens ou frein à l’innovation AGI?
Avec l’AI Act, l’Europe tente d’établir un équilibre délicat entre la protection du citoyen et le soutien à une industrie de l’intelligence artificielle générale compétitive. Mais les points de friction s’accumulent:
- Définition légale d' »IA à usage général »: La notion de « General Purpose AI » (AGI) ou intelligence artificielle généraliste est floue. Où fixer la frontière entre innovation et surveillance?
- Transparence et documentation: Les fournisseurs de modèles devront publier documentation technique, données d’entraînement, risques potentiels… Un surcoût lourd pour les startups européennes.[Parlement Européen], [CNIL]
- Responsabilité et sécurité: Les obligations de journalisation, d’évaluation de risques, de transparence algorithmique changent la donne pour l’industrie.
- Gouvernance et conformité: Les PME et acteurs émergents de l’IAG dénoncent un choc de compétitivité. Les poids-lourds mondiaux, hors UE, ne sont pas soumis aux mêmes contraintes – un « handicap réglementaire ».[BSR]
Ce débat fait émerger une crainte: l’Europe court-elle le risque de manquer la vague AGI? Plus d’analyses dans l’article sur la stratégie polonaise autour de l’AI Act.
Controverse: Champions européens, alliés objectifs de l’AGI ou gardiens du statu quo?
Parmi les signataires de l’appel contre l’AI Act, on retrouve des start-ups hyper innovantes comme Mistral AI (France) ou Aleph Alpha (Allemagne), mais aussi des mastodontes tels que Airbus, ASML, Siemens, SAP, BNP Paribas ou Mercedes-Benz. Leurs intérêts convergent autour de deux axes stratégiques:
- Faire évoluer la régulation: Ces acteurs défendent une intelligence artificielle compétitive, ouverte sur le monde, sans sacrifier aux mastodontes américains ou chinois. D’où leur lobbying actif pour « recalibrer » la gouvernance de l’AGI.
- Garantir l’éthique et l’attractivité: Beaucoup avancent l’image d’une « AGI éthique » made in Europe. En réalité, le bras de fer porte aussi sur la compétitivité, la stabilité réglementaire, et la défense de positions acquises face à la déferlante des modèles ouverts ou propriétaires (voir la guerre open source vs propriétaire).
Derrière l’argumentaire public, certains observateurs pointent une tentative de préserver le statu quo industriel sous couvert d’innovation responsable. Mais ce front, transversal public/privé et science/industrie, a pour effet de structurer durablement l’écosystème continental autour de l’ia générale.
Les débats sur les « zones grises » et la Shadow AI européenne alimentent la réflexion sur la gouvernance future de la superintelligence artificielle en Europe.
Alternatives et scénarios pour la régulation AGI made in Europe
Face aux blocages, plusieurs pistes d’évolution émergent dans les débats experts et au sein de Bruxelles:
- Regulatory sandbox & phasage: Lancer des « bacs à sable » de régulation pour tester de nouvelles approches sur l’IA généraliste, avant un déploiement généralisé. La Commission pousse cette méthode pour mieux concilier sécurité et innovation.
- Plan d’action AI Continent 2025: L’UE évoque un plan plus ambitieux qui allie simplification des procédures pour start-up, reporting proportionné, et concertation transnationale.[Simmons & Simmons]
- Gouvernance agile et risque: Application de logiques « risk-based » pour concentrer la régulation sur les modèles d’AGI les plus puissants, tout en allégeant les contraintes sur l’innovation de rupture.
- Harmonisation et coopérations globales: Éviter une « régulation à deux vitesses » qui marginaliserait l’Europe, grâce à une gouvernance commune avec autres puissances techno.
L’avenir de l’intelligence artificielle générale européenne se jouera sur la capacité à sortir de l’impasse règlementaire sans céder sur la sécurité, au risque sinon de voir émerger une fracture entre champions mondiaux et écosystème régional.
Conclusion: Le moment AGI de vérité pour l’Europe?
Le bras de fer sur l’AI Act révèle les dilemmes de l’Europe: entre risque de faire fuir talents et investisseurs d’un côté, et opportunité de façonner des règles de l’intelligence artificielle générale à vocation mondiale de l’autre. L’issue pèsera lourd pour les chercheurs, développeurs, industriels… et stratèges publics décidés à réguler la superintelligence artificielle.
Les choix européens autour de l’AGI pourraient permettre de construire un nouveau modèle de confiance globale, mais aussi provoquer une marginalisation technologique si l’impasse réglementaire perdure.
Pour aller plus loin sur les risques cachés et perspectives d’avenir, consultez notre dossier sur la Shadow AI ou les lignes rouges 2025. Notre site reste la référence pour comprendre l’avenir de l’intelligence artificielle et de l’IA générale en Europe.